Archives par mot-clé : Education populaire

Safer space & Organisations démocratiques : « Lutter ensemble »

Dans son ouvrage « Lutter ensemble – Pour de nouvelles complicités politiques » (novembre 2018, éditions Cambourakis, collection Sorcières), Juliette Rousseau défend la nécessité de regarder en face ce qui nous sépare, les dominations qui traversent nos collectifs et nos mouvements, afin de pouvoir (mieux) s’en défaire et lutter ensemble. Aujourd’hui encore, il est difficile d’aborder ces questions, de questionner les façons dominantes de penser et de faire.
Il ne s’agit pas de mettre toute notre énergie sur la « déconstruction » individuelle, comme préalable à toute action politique, mais de prendre conscience que refuser celle-ci dessert nos luttes, notre émancipation et la transformation sociale. Les rapports oppressifs ne seront pas abolis au lendemain du grand-soir, quand le capitalisme aura été abattu : les combattre ici et aujourd’hui est un moyen d’une part de développer notre capacité collective à lutter ensemble, et est d’autre part une lutte directe contre ce qu’il nous faut abattre et dont les différentes composantes se tiennent les unes les autres.

Je reproduis ci-dessous deux extraits de l’ouvrage de Juliette Rousseau, deux outils qui peuvent servir de base pour s’interroger sur les pratiques que l’on souhaite avoir, sur les règles qu’on souhaite collectivement instituer dans son collectif :

  • Les « règles pour un espace plus safe » utilisées par le collectif Sisters Uncut (Royaume-Uni)
  • Les « principes de Jemez pour une organisation démocratique »

Ces deux textes sont issus d’un ouvrage de 500 pages : s’ils vous posent question, si vous sentez que vous avez besoin de plus de contexte, si vous avez envie d’aller plus loin dans ces réflexions, je vous invite à lire le bouquin !

Sur ce thème, voir aussi la page Transformation sociale & construction de « safer spaces » et de « brave spaces »

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Micropolitiques des groupes

Micropolitiques des groupes : pour une écologie des pratiques collectives. De David Vercauteren, aux éditions Amsterdam. Depuis le temps que je voulais le lire, ce livre… D’abord publié en 2007 chez HB éditions, réédité en 2011 aux Prairies ordinaires, et à nouveau épuisé, il a réédité en 2021 par les éditions Amsterdam. Alors ça y est, je l’ai lu, et je n’ai pas été déçue ! J’y ai trouvé plein de choses qui résonnent et inspirent, qui vont me servir conceptuellement et en pratique. J’y ai reconnu la façon d’appréhender les problèmes (de « problémer ») qui est celle qu’on pratique dans l’entraînement mental, pour penser et agir dans la complexité.

Les thèmes abordés sont les suivants :
Artifices / Assembler / Autodissolution / Décider / Détours / Évaluer / Événement / Fantômes / Micropolitiques / Parler / Pouvoir / Problémer / Programmer / Puissance / Réunion / Rôles / Scission / Silence / Souci de soi / Subsides (subventions) / Effet de théorie.

Je note ci-dessous des extraits, nécessairement sortis de leur contexte. Et, surtout, je vous invite à vous procurer et à lire ce livre.

À noter qu’il est entièrement accessible en ligne sur le site https://micropolitiques.collectifs.net , sous une forme qui permet de naviguer entre les différentes entrées de l’ouvrage !

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Manifeste de Peuple et culture

Le Manifeste de Peuple et culture date de 1945, au sortir des maquis et de la Résistance. Aujourd’hui encore, il reste une référence pour les pratiques et les ambitions d’éducation populaire. Cependant, et ainsi que nous y invitaient ses rédacteurices, il est à replacer dans son contexte historique.

Je le reproduis ici en totalité.

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Niveaux de participation : démocratie ou démagogie participative ?

Manipulation / Éducation / Information / Consultation / Implication / Partenariat / Délégation de pouvoir / Contrôle des citoyen-nes :

La sociologue américaine Sherry R. Arnstein a défini en 1971 (dans son ouvrage  A ladder of citizen participation) 8 niveaux qui vont de la non-participation au partage total du pouvoir.

Cette grille peut nous être utile pour identifier et clarifier, pour nous et pour les autres, à quel niveau nous nous situons : chaque niveau (sauf le premier) est légitime, mais il est courant de ne pas être clair-es et honnêtes sur le niveau dans lequel on se trouve, et de qualifier de « démocratie participative » ce qui n’en est pas, entrant alors de fait, volontairement ou non, dans de la démagogie…

+ en fin d’article : Adaptation de cette échelle à la participation des enfants dans les projets, par Roger Hart

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Syndicalisme de classe & action collective émancipatrice en Union locale

Le syndicalisme-révolutionnaire est le courant fondateur de la CGT, qui s’est créée en 1902 par la fusion entre la Fédération nationale des syndicats et la Fédération des Bourses du travail (dont le secrétaire général était l’anarchiste Fernand Pelloutier). Ce regroupement a entraîné la double structuration syndicale telle qu’elle existe encore aujourd’hui, croisant une structuration en unions locales et départementales, parallèle à une structuration par industries (ou par entreprise). La Charte d’Amiens quant à elle a été adoptée en 1906 par le 9e congrès de la CGT, sous l’influence de ces courants syndicalistes-révolutionnaires. Elle définit le principe
d’autonomie du syndicalisme ainsi que celui de la double-besogne.

Les Bourses du travail de Fernand Pelloutier étaient le cadre de pratiques militant-es d’éducation populaire ambitieuses et dynamiques. Aujourd’hui, les syndicalistes-révolutionnaires continuent de défendre et de mettre en œuvre ces pratiques, notamment dans le cadre des Unions locales et départementales, qui sont les héritières des Bourses du travail.

Les CSR, Comités Syndicalistes Révolutionnaires, regroupent des militant-es syndicalistes révolutionnaires. Leurs textes permettent de mieux comprendre ce qu’est le syndicalisme révolutionnaire. La brochure « Construire et animer une Union locale », réalisée en 2010 par des militant-es des CSR, est extrêmement intéressante à ce sujet, et permet de voir le lien direct et fondamental qui existe entre les pratiques et philosophies du syndicalisme-révolutionnaire et de l’éducation populaire. Cette brochure vise à défendre une conception de l’Union locale (UL) comme un cadre de pratiques collectives interprofessionnelles de lutte et d’éducation populaire. Ces pratiques ont également beaucoup en commun avec les principes qui sous-tendent les principes du community-organizing étatsunien. Le côté « éducation populaire » se retrouve surtout dans la fin de la brochure, mais l’ensemble de celle-ci invite à adopter des postures militantes qui sont celles de l’éducation populaire : lutter contre la séparation entre celleux qui pensent, celleux qui font, celleux qui décident, c’est-à-dire lutter contre notre tendance à reproduire la division sociale du travail et la délégation de pouvoir, socles des logiques capitalistes et bourgeoises, afin de construire ensemble, dès aujourd’hui dans nos pratiques et donc avant tout dans nos organisations, notre émancipation. Les CSR se présentent en fin de brochure (à retrouver à la fin du présent article).

Les extraits que je propose ci-dessous sont une sélection des contenus qui m’ont particulièrement intéressés (et il y en a beaucoup). Ces extraits sont nécessairement sortis de leur contexte : si certains points ci-dessous vous intéressent ou vous interrogent, je vous invite à vous référer au texte complet.
Les sous-titres et les mises en exergue (en italique et en gros) sont de mon fait, et proposent une grille de lecture qui se veut complémentaire à la titraille d’origine (en gras et en gros).

La brochure peut être demandée en écrivant à syndicalistes@gmail.com. A priori elle n’est plus disponible sur le site des CSR, mais peut-être le sera-t-elle bientôt à nouveau, et dans tous les cas il y a de nombreux textes très intéressants à y découvrir pour nourrir nos pratiques et réflexions.

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La lutte des Young Lords contre l’intériorisation de la « mentalité colonisée »

Dans le livre « Young Lords – L’histoire des Black Panthers latinos (1969-1976) » (éditions L’échappée, 2017, 254 pages, 19€), Claire Richard nous fait découvrir, grâce à des extraits d’entretiens qu’elle a réalisés et de publications de l’époque, l’histoire et la lutte méconnue des Young Lords. Ces jeunes militant-es, enfants étatsunien-nes de l’immigration portoricaine, ont mené au début des années 1970 une lutte pour l’émancipation et contre le capitalisme en commençant par ramasser les poubelles dans El barrio, quartier portoricain de New-York, puis en développant la santé communautaire. Le livre donne une image très concrète de leur action militante, et notamment de leur conviction de la nécessité de « faire la révolution dans la révolution », c’est-à-dire de traquer en soi (individuellement et collectivement) les structures de la domination.

Je reproduis ici quelques extraits traitant en particulier de la construction d’une fierté collective (celle qui nous rend capable de rêver à un changement, et de lutter pour le faire advenir), ainsi que de la lutte contre la « mentalité colonisée » (intériorisation de l’infériorité).

Un livre à lire…

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Droits culturels et émancipation

Dans cet entretien, Patrice Meyer-Bisch donne un aperçu très éclairant de ce que sont les droits culturels, et de ce que cette notion apporte de fondamental pour penser la démocratie, l’émancipation, et bien-sûr la culture. Sous la vidéo de cet entretien, ci-dessous, je mets en exergue les éléments qui m’ont le plus marquée.

Patrice Meyer-Bisch est philosophe, président de l’Observatoire de la Diversité et des Droits Culturels et coordinateur de la Chaire UNESCO Droits Humains et Démocratie au sein de l’Université de Fribourg.
Retrouvez également cet article : « Qu’est-ce que les droits culturels ? »

Cet entretien a été réalisé dans le cadre de la Rencontre professionnelle sur la Participation culturelle organisée par l’association Images en bibliothèques (à retrouver ici, tandis que là j’en ai reproduit l’introduction).

Il a été réalisé par les étudiant-es du Master 2 Médiation et création artistique de Paris III.

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La participation culturelle

Le 8 décembre 2020, en ligne, Images en bibliothèque organisait une Rencontre professionnelle sur la participation culturelle. Il s’agissait de réfléchir à comment dépasser l’ambition de démocratisation culturelle, qui consiste à « rendre accessible au plus grand nombre
les œuvres capitales de l’humanité » (selon les mots d’André Malraux lors de la création du ministère de la Culture en 1959), pour construire la possibilité que le public ne soit plus simplement les spectateurs ou les simples destinataires des œuvres.

Retrouvez :

  • Tous les contenus de cette rencontre sur le site d’Images en bibliothèques, avec un grand nombre d’interventions passionnantes en vidéos.
  • Ci-dessous, la vidéo d’ouverture, par Jean-Yves de Lépinay, Président d’Images en Bibliothèques, sous laquelle j’ai noté les éléments qui m’ont le plus intéressée.
  • Ici, des vidéos de Patrice Meyer Bisch parlant de la notion de droits culturels et de ses conséquences, au cours de cette même rencontre.

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